dimanche 9 septembre 2012

Lourdes, lentes…, André Hardellet (Pauvert, 1974)


Relisant ce livre m’apparaît soudain l’étonnante logique cachée qui nous fait aimer non pas un livre plutôt qu’un autre mais un livre en ce qu’il parle à un autre ou plusieurs, et par ce qu’ils ont en commun (et peu importe la chronologie, ici règnent l’anachronisme et la vérité des entrailles). Les textes qui nous marquent semblent en effet se répondre et s’unir dans l’écho général  de nos obsessions. Et dans le cas de ce livre inclassable d’André Hardellet, ni poème en prose ni conte érotique en même temps que les deux, me saute aux yeux, à l’esprit et surtout au cœur une triple parenté qui concerne deux livres déjà traités dans ce blog.

La relation la plus évidente est l’échange sombre et profond qui unit Lourdes, lentes… à La Nuit, le jour et toutes les autres nuits (1978) de Michel Audiard. On y retrouve en effet un même triangle d’or composé de l’attraction de l’amour physique, de l’omniprésence de la mort au sein de la vie et du caractère cru et entier de la langue écrite. Au point que l’on se demande si le secret de la beauté pourtant unique de ces deux textes ne provient pas de ce qu’ils font de ces trois éléments un seul et même point central : inattaquable car trois fois plus fort, plus résistant.

A l’inverse de ce lien évident et continu, un paragraphe étrange - comme inattendu dans le texte, peut-être le seul dans ce cas d’ailleurs - nous fait immanquablement penser à Le Zen dans l'art chevaleresque du tir à l'arc d’Eugen Herrigel. Le voici, on l’en croirait même tout droit sorti : « Je suis l’archer Zen dont la flèche se détache à l’instant précis où lui-même, l’arc, le trait, le vent, l’aile de l’oiseau qui passe, la lumière du jour et jusqu’au rayon d’une étoile morte depuis des siècles, tombent d’accord pour que le but soit atteint. »

Enfin, la seconde partie de Lourdes, lentes… tourne autour de Londres quand elle ne s’y déroule pas. Et quand on la rapproche de l’éloge du rêve et de la rêverie qui traverse le texte depuis ses premières lignes, on ne peut s’empêcher de penser au fameux voyage imaginaire que fait Des Esseintes, le héros d’A Rebours de Huysmans, dans un pub anglais de Paris.

Notre voyage à nous s’arrête ici mais l’on se prend heureusement à penser que c’est le seul livre d’Hardellet que nous ayons lu à ce jour. A la manière dont Jules Renard écrivait dans son Journal : « Quand je pense à tous les livres qu’il me reste à lire, j’ai la certitude d’être encore heureux. » A suivre donc…

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