Les Dimanches de Jean Dézert est l’histoire d’un petit fonctionnaire parisien célibataire dont la vie oscille entre ennui et résignation. A la fois court et implacable, désespéré et léger, ce roman occupe une place essentielle dans le passage entre XIXe et XXe siècles, comme Avec le feu de Victor Barrucand quelques années plus tôt, bien loin de l’histoire littéraire officielle. En ce qui le concerne, Jean de la Ville de Mirmont (né en 1886 à Bordeaux) réussit à sortir de l’impasse fin-de-siècle en détruisant de l’intérieur la médiocrité bourgeoise qu'il décrit grâce à un merveilleux mélange d’humour et d’absurde tout à fait inédit (Alfred Jarry et Alphonse Allais sont passés par là entre-temps...). Jean, le héros de son livre, n’est autre que son double contrarié et ridicule, renversé, jusque dans son nom de famille : Dézert vs. de la Ville. Enfin, la voix de l'auteur se retrouve dans celle du narrateur qui surgit à intervalles réguliers avec une distanciation pleine d’ironie, l’ensemble donnant au livre un ton et un style étonnamment modernes.
Livre sur rien, ultra-moderne et peut-être même parfait au sens où le réel rattrapa immédiatement son auteur au moment de sa publication : un nouveau collègue prit en effet ses fonctions au bureau du ministère où travaillait de Mirmont et il s'appelait... Jean Dézert !!!
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* Malgré les efforts d’Eric Dussert (via son blog L’Alamblog),
de Jérôme Garcin (via son roman Bleus
horizons et un article)
et de Charles Dantzig (Dictionnaire
égoïste de la littérature française) qui a également réédité ce roman
et les autres œuvres littéraires de l’auteur en 2008 aux éditions Grasset. A
noter enfin : les Œuvres complètes de
Jean de la Ville de Mirmont (précédé d'une magnifique étude de Michel Suffran) était le livre de chevet de l’immense Philippe
Noiret qui en fit une lecture publique à Bordeaux. Il en parle avec passion
dans son excellente autobiographie, Mémoire
cavalière (2007).
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