mercredi 25 février 2015

Daniel Cordier, De l'Histoire à l'histoire (Gallimard, 2013)




L'histoire d'un homme seul : seul au moment de quitter la France pour rejoindre Londres dès juin 1940, seul aux côtés de Jean Moulin pendant la Seconde guerre mondiale, seul jeune homme présent aux réunions des chefs de la Résistance, seul dans son refus de parler de ses années de résistant après la Libération, seul de sa famille à avoir eu un tel parcours politique, seul contre les calomniateurs de son ancien patron trente ans après la fin de la guerre, seul au milieu des archives pour rétablir ensuite la vérité, seul historien non-professionnel à mener ce combat, seul survivant ou presque aujourd'hui parmi les Résistants de la première heure, seul désormais face à la mort...

Seul et, à chaque fois, sublime.

-------

Le double parfait du magnifique documentaire Jean Moulin, lettre à un inconnu que William Karel lui a consacré.
Le livre qui manquait entre La Mémoire courte de Jean Cassou et Comme on écrit l'histoire de Paul Veyne.

lundi 23 février 2015

Chutier !

Voici la liste (non exhaustive) des textes que j'espérais chroniquer dans ce blog mais qui se sont malheureusement révélés dans mon cas des déceptions plus ou moins lourdes : preuve - s'il en fallait - que la quête de perles rares n'est ni une science exacte... ni une sinécure !

- Albertine Sarrazin, L'Astragale (Pauvert, 1967)
- Jean Desbordes, Les Forcenés (Gallimard, 1937)
- Anne Zidek, La Condition des soies (Minuit, 1982)
- Lucien Jacques, Tombeau d'un berger (1952, rééd. 1999, Centre Jean Giono / Alpes de Lumière)
- Amos Tutuola, L'Ivrogne dans la brousse (Gallimard, 1953)

- Alan Sillitoe, La solitude du coureur de fond (Seuil, 1963)
- Chris Marker, Le Cœur net (Seuil, 1949)
- André de Richaud, Je ne suis pas mort (Robert Morel, 1965)
- Carmen Laforet, Nada (Destino, 2005)
- Catherine Claude, Ciel blanc (Gallimard, 1967)
- Emmanuel Robin, L'Accusé (Phébus, 2003)
- Stephen Crane, La Conquête du courage (Livre de poche, 1967)
- Adolfo Bioy Casares, L'Invention de Morel (Robert Laffont, 1973)
- Michel Bernanos, La Montagne morte de la vie (Jean-Jacques Pauvert, 1967)
- Julien Torma, Le bord de la mer (Collège de Pataphysique, 1955)
- Sylvain Runberg & Phicil, London Calling (Gallimard, 3 volumes : 2007, 2008 et 2010)
- Valery Larbaud, Fermina Márquez (paraît en volume chez Fasquelle en 1911)
- Dany Laferrière, Tout bouge autour de moi (Mémoire d'encrier, 2010 et Grasset, 2011)
- Roger Rudigoz, Le Fauteuil vert (Le Tout sur le Tout, 1986)
- G.K. Chesterton, Le nommé Jeudi (Gallimard, 2002)
- Isaac Rosa, Encore un fichu roman sur le guerre d'Espagne ! (Bourgois, 2010)
- Mireille Havet, Carnaval (Fayard, 1922)
- André Vers, Martel en tête (Edmond Nalis éditeur, 1967)
- Jean-Paul Clébert, Paris insolite (Denoël, 1952)
- Tomas Harris, Garbo : The Spy Who Saved D-Day (The National Archives, 2000)
- Etc...

Alors, me direz-vous, c’est bien joli tout ça mais qu’entendez-vous exactement par « perle rare » ? Effectivement, cette expression ne veut rien dire en soi à propos d’un livre. Ou plutôt si : tout et son contraire, en fonction de celui qui l’emploie et de son humeur, de son interlocuteur, du moment de sa vie… Ainsi, Les Fleurs du mal, les Pensées, Crime et Châtiment, La Métamorphose sont évidemment des perles rares à leur manière pour beaucoup et si l’on ne s’interdit pas d'aborder ce genre de bijoux précieux dans ce blog, on évite seulement de le faire pour que l’internaute découvre peut-être autre chose que ce qu’il connaît déjà.

En d’autres termes, notre éloge de la perle rare n’est en aucune manière un éloge déguisé des livres pour « happy few ». Pourquoi ceux-ci auraient-ils d’ailleurs plus de valeur que les ouvrages publiés au contraire avec l'unique mais ferme intention de battre des records de vente ? Si nos perles se doivent donc d’être rares, elles doivent néanmoins être consultables (en bibliothèque ou sur Internet) et/ou abordables (la bibliophilie étant un sport pour « happy few »). Enfin, nous n’oublions ou ne sous-estimons surtout pas les rôles respectifs et entremêlés du hasard et de la subjectivité en matière de goût pour les livres et donc dans leur participation à la définition – toute relative – de ce que l’on entend par « perle rare ».

Mais bon, essayons quand même : par « perle rare » (plutôt que « chef-d’œuvre », trop galvaudé et trop péjoratif si accompagné de « mineur » ou trop restrictif si suivi de « oublié », ou encore OLNI pour Objet Littéraire Non Identifié, trop inesthétique et limité au champ littéraire), nous entendons donc d’abord un livre qui laisse en nous une trace indélébile après l’avoir lu, comme un défunt que l’on ne peut/veut oublier. Et pour cela, peu importent son genre, son tirage, son prix, son auteur, son format, sa date de première publication… Deuxième caractéristique de la « perle rare » selon nous : pendant la lecture, elle réussit à nous donner l’impression – et non l’illusion – que l’on lit avec un tel plaisir pour la première fois. La perle est donc d’autant plus rare que l’effet qu’elle produit sur le lecteur est à la fois unique, au double sens d'exceptionnel et de propre à chaque lecteur, mais aussi potentiellement reproductible pour chaque livre. A condition bien évidemment que l’on remette vite la main sur une nouvelle perle rare mais c'est là une autre histoire… où l'on en revient (souvent) au chutier !